Drapés de safran, des bonzes gravissant les marches de vertigineux « temples-montagnes » ; prisonnières de la mousse, des « tours-visages » souriant dans lʼombre dʼune forêt de lianes ; la taille étranglée et les seins lourds, des nymphes célestes esquissant un pas de danse sous le regard des dieux...Le Cambodge de Jacques Sierpinski a des allures de Recherche du Temps Perdu.
Nulle fureur, nulle tourmente dans ces images ouatées sur lesquelles souffle une douce nostalgie.
Des grappes dʼenfants sʼégayent dans lʼeau miroitante des bassins construits des siècles auparavant par leurs glorieux ancêtres ; des jeunes femmes cueillent du liseron dʼeau pour préparer la soupe ; des silhouettes de lions montent la garde sur les champs...
Oscillant entre archaïsme et modernité, ces « autochromes » qui nʼen sont guère, trahissent lʼimmense amour de ce photographe toulousain pour ces terres des origines surgies de lʼeau, elle-même surgie du ciel. Cycle de métamorphoses incessantes qui changent les fleuves en boue, et la boue en riz. Qui transforment les poissons en princesses et les souverains en Bouddhas...
Des immenses plaines liquides ponctuées de collines et de montagnes, Jacques Sierpinski sʼest fait lʼinspiré chroniqueur. Mi-archéologue, mi-photographe...
Voyageur et pèlerin tout à la fois...
Bérénice Geoffroy-Schneiter